Extrait de pente
La pente raide est un sport qui consiste à descendre à ski des pentes de neige allant de "très pentues" à "abominablement pentues". Ce sport a été initié par des skieurs amateurs d'acrobaties, de sensations fortes et d'expériences engagées. Il s'agit de Boivin, de Vallançant, de Chantriaux ou encore de Saudant dans les années 60 et 70.
Depuis leurs successeurs ont démocratisés la pente raide en multipliant les descentes les plus vertigineuses. Les topos de ski ont tenté de répertorier et hiérarchiser les couloirs de tous les massifs. Le matériel de ski de randonnée s'est allégé et fiabilisé pour permettre une pratique de plus en plus aisée. Il y a encore quelques années, le skieurs de pentes raides ne pouvaient pas se passer de son matériel de ski de piste suffisamment robuste. Il fallait ajouter des adaptateurs sur les fixations de ski de piste pour remonter une pente en peau de phoque. Aujourd'hui il n'est pas rare de voir du monde en low tech dans du 45°, avec des chaussures de randonnées dont le maintient s'est beaucoup amélioré. Les meilleurs skieurs enchaînent les virages à rythme soutenu. Quand les conditions sont bonnes, les descentes de couloir s'apparentent plus à du free ride, qu'au virage sauté et aussitôt stoppé d'autrefois.
Descente en ski du sommet de la Malédie le 23 avril 2009: Une pente courte, mais rarement en bonne condition à cause des rochers qui pointent un peu partout.
Nicolas Féraud dans le couloir du Muraillon qui permet de faire le tour de la Malédie en descendant sur le refuge Pagari. Ce couloir orienté Est doit être descendu très tôt au printemps pour que la neige ne soit pas trop molle..
Le massif du Mercantour regorge de pentes raides à ski. Le relief s'accentue d'Ouest en Est pour finir par les couloirs mythiques de l'Argentera. L'ensoleillement important permet une stabilisation relativement rapide de la neige et il est possible de descendre des couloirs plein cagnard en transfo en plein hiver. La géologie cristalline de l'Est du massif favorise les structures de couloirs raides et élancés rayant des faces de plus 1000m.
Une des perles du massif est certainement le Mont Pélago qui regorge d'itinéraires de pentes raides très faciles d'accès depuis le Boréon. Tout se skie au pélago: couloir Nathalie (W), couloir Sud, petit couloir Est, grand couloir Est, couloir Nord Est.
Vue plongeante sur le Boréon depuis le haut du couloir Sud du Pélago descendu avec Mathieu Blanchard le 10 mars, en neige béton!
Cherchez bien le refuge de Cougourde sur cette photo prise dans la descente du grand couloir Est du Pélago le 26 mars. C'était peut être bien une première, reprise quelques semaines plus tard par les frères Couturier: un couloir évident mais expo au-dessus d'une traversée dans le bas de la face.
Contrairement aux idées reçues, une pente à 45° (1 pour 1) est déjà très raide, et on parle de ski de pente raide dès 35° à 40° de moyenne. Les pentes les plus raides à ski ne dépassent pas les 60°.
Les spécialistes mesurent la pente avec un clinomètre : sorte de compas qui donne l'inclinaison de la pente. Mais pour vous en convaincre lors de votre prochaine sortie, vous pouvez déjà évaluer la pente avec vos deux bâtons. Posez en un à la vertical sur la neige et faites un angle droit avec l'autre posé au sommet du premier à l'horizontale pour construire un triangle entre les 2 bâtons et la neige. Si le deuxième bâton ne touche pas la neige c'est que la pente est inférieure à 45°.
Mumu dans l'esthétique couloir Est de la cime de Paranova qui descend directement du sommet jusque dans la Gordolasque sur le Pont Countet le 17 mars. Malgré leur faible altitude, les couloirs de la cime de Paranova sont tout aussi majeurs que ceux de la face Sud Est du grand voisin le Néglier. Et quand ça skie depuis le sommet, comme cet hiver, c'est tout simplement fabuleux.
Dans le couloir Sud du Caïre Frémus le 19 mars 2009. Une goulotte vertigineuse de 1200m de haut qui passait miraculeusement en ski cet hiver grâce aux chutes de neiges importantes : ca se passe en chaussant les planches au sommet du Mt St Sauveur à 20min du haut des pistes d'Isola 2000 dans une des faces les plus rébarbatives du département.
Le ski de pente raide est un sport pour les patients, bien loin de l'image des jeunes excités s'élançant à grande vitesse dans les hors pistes des stations de ski, à peine descendu du télésiège.
Les bonnes conditions pour descendre les pentes les plus raides sont rares et certains itinéraires ne sont praticables que quelques jours dans l'année. L'amateur de pente vertigineuse doit donc tenter de deviner quand son objectif est fréquentable en fonction des dernières chutes de neige, du risque d'avalanche, de l'orientation, de la température. Il n'est pas rare de devoir renoncer à une descente une fois arrivé au sommet ou de devoir descendre en rappel une section en mauvaise condition. Il faudra revenir plusieurs fois, pour enfin être au bon endroit au bon moment.
Pour éviter de se faire piéger par une neige dangereuse, glacée ou plaquée une fois engagé dans la pente, il est conseillé de remonter à pied dans le couloir convoité. Les conditions de neige les plus agréables en pente raide sont la poudreuse et la neige transfo. Mais la météo peut jouer des tours. Il est fréquent qu'un nuage empêche le dégèle de votre pente ou que le vent emporte toute la poudre, ne vous laissant qu'une vitre glacée en guise de toboggan.
Quand le moral ou les conditions ne sont pas au rendez-vous, la corde peut sauver la situation, comme ici dans le haut du couloir du Hochjoch qui nous a permis de faire le tour du mt Zebru. C'était le seul passage praticable pour rejoindre le refuge suivant en traversant la barrière de la chaine Zebru/Ortles
Tentative le 25 avril de descente de l'arête du St Robert au Gélas. Une fine couche de poudre cache une neige vitrifiée.... La descente en grande courbe sera pour une autre fois! Il vaut mieux jouer d'abord la sécurité en sortant la corde.
Pour finir ce reportage sur la pente raide dans les Alpes Maritimes, je vous laisse lire un article de Volopress qui étudie l'engouement de ces dernières années pour ce sport. Une analyse intéressante est d'ailleurs faite sur les effets d'internet et des comptes rendus de course disponibles en ligne stimulant les envies du plus grand nombre. C'est à lire ici.